SEP : B comme bataille

Lettre b

 

 

Bataille.  La SEP : une bataille de tous les jours.  Si je m’écoutais, j’écrirais « perdue d’avance » puisque chaque fois que je sens une évolution, je sais que jamais, il n’y aura de marche arrière (la marche en avant est déjà impossible, alors, en arrière, je ne vous dis pas Clin d'oeil).  Attention, je ne parle que de mon cas ; les formes de la maladie sont tellement variables d’une personne à l’autre.

Mais où donc cela va-t-il s’arrêter ?  Ou devrais-je dire « cela va-t-il s’arrêter » ?  Je suppose qu’un jour, il ne me sera plus possible de sortir de ma chaise ; cela, même si c’est hautement probable (remarquez quand même combien j’ai besoin de laisser malgré tout planer le doute), je ne veux pas me l’imaginer.  Je refoule cette idée au plus profond de moi, comme si ne pas y penser empêcherait sa réalisation.  Plus encore : me retrouverai-je un jour grabataire ?  Dépendante en tous points alors que j’ai toujours revendiqué mon indépendance ?

Je préfère évacuer cette idée parce que je ne puis la supporter… Il y a des jours où j’ai vraiment envie de me battre, habitée par une espèce de rage qui me donne des ailes ou presque…  Des jours où j’envisage un avenir, comme tout un chacun…  mais ces jours sont peu nombreux… Les autres, impossible de me projeter dans le futur, comme s’il n’y avait pas de futur pour moi…  Alors je vis au jour le jour, je profite de ce dont je peux profiter tant qu’il est encore temps et paradoxalement, j’ai aussi besoin d’avoir des projets même si…  Personne n’a jamais dit que cela n’était pas compliqué…

Comment imaginer pour quiconque marche normalement, sans même y penser, comment donc imaginer l’immense difficulté de faire un pas, de mettre un pied devant l’autre et de tenter d’avancer ?  De soulever cette jambe droite, si lourde, – ma mauvaise jambe, si tant est que l’autre soit bonne – pour la faire mouvoir sans qu’elle n’accroche le sol et me fasse tomber…  D’autant que la chute peut m’immobiliser longtemps : si je suis seule, je dois attendre d’avoir suffisamment de force pour me traîner jusqu’à un fauteuil qui ne soit pas trop haut et essayer de m’y hisser.  Je dois parfois m’y reprendre à plusieurs reprises.  Et si je ne suis pas seule… hé bien, je ne veux généralement pas que l’on me vienne en aide.  Non pas qu’il s’agisse d’orgueil mal placé (encore que ?) mais je préfère avoir recouvré assez de force pour me soulever moi-même… 

L’horreur suprême, c’est la chute dans la famille : déjà quand je ne tombe pas mais que je ne fais que trébucher, tout le monde se précipite comme si survenait un tremblement de terre mais alors quand la chute est réelle, je ne vous dis pas…  Et je déteste alors la pitié que je vois insidieusement se dessiner sur les visages (en fait, je ne vois rien puisque je tombe 😉 mais je la devine, je la sens, je la redoute…).  Et je m’en veux alors aussi de les faire souffrir, bien involontairement, du reste.  Tout cela pour dire que, finalement,  je préfère chuter seule…

[Illustration : http://coloriage.gulli.fr/coloriage-Lettre-B%5D

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