Le (gros) problème avec cette maladie, c’est qu’elle peut réellement être source de galère(s) ; je dis « peut » parce qu’il y a autant de scléroses en plaques que de malades. J’ai déjà évoqué mon manque de compassion (traduction : mon intolérance) à l’égard de ceux qui ont (une forte) tendance à se plaindre pour des broutilles, du genre (mes élèves diraient « genre » et non « du genre », c’est présentement – ceux qui me lisent régulièrement savent que j’affectionne cet adverbe québécois – une de leurs expressions favorites) : « c’est horrible, je me suis cassé l’ongle de l’auriculaire ». Ok, j’exagère, personne n’a jamais osé me « sortir » une réflexion de ce type. Cela dit, des broutilles pour l’un ne sont pas celles de l’autre, l’être humain a souvent, me semble-t-il, une faculté, parfois exceptionnelle à « s’adapter » aux circonstances, aux aléas de la vie et à hausser le degré du tolérable en cette matière. Bref, je reviens à mes galères.
Aujourd’hui, cela peut être me lever des deux pieds droits (hé oui !) et malgré cela, savoir après quelques minutes que cette journée sera l’une de celles aux cours desquelles j’attendrai de pouvoir aller dormir, en espérant que le matin suivant sera tout autre. À cause de quoi, donc ? Simplement parce que les jambes ne suivent pas (j’entends déjà ceux qui pensent que les jambes sont là pour supporter et non suivre !) et que je sais pertinemment que je me traînerai lamentablement en me disant que je préférerais ne pas avoir de séance de kiné, tout en sachant que c’est un mal nécessaire (vous me suivez ? – pas comme les jambes -).
Aujourd’hui (vraiment ce vendredi), c’est un faux mouvement qui m’a empêchée d’aller travailler. Un genou déjà bien amoché en temps « normal » (qui fait s’extasier les kinés lorsque je vais en revalidation à Fraiture !) auquel j’ai réussi à ajouter une « belle torsion ». S.O.S glace en espérant que ça se résorbera d’ici lundi. C’est ainsi que je me dis que tout compte fait, je préférais « avoir du mal » comme hier, c’était quand même plus supportable, même si hier, c’était déjà difficile (vous me suivez toujours ?).
La galère, c’est surtout pour moi ne pas laisser une trop grande part d’imprévu lors de tout déplacement : ce que j’appelle une expédition se doit d’être bien préparée et même quand elle l’est, je rencontre parfois des problèmes auxquels les « organisateurs » n’ont pas songé car tant que l’on n’y est pas confronté, on a du mal de tout prévoir : parce que non, ma chaise roulante n’est pas tout-terrain, parce qu’il m’arrive parfois (de plus en plus rarement, il est vrai) d’être seule et que je n’ai alors que mes pauvres bras pour me faire avancer, parce que ma chaise a une certaine largeur et doit pouvoir passer d’une pièce à l’autre, parce que ce que je nommerai pudiquement les lieux de commodité devraient être … commodes pour tous.
Cela peut être devoir se garer à plusieurs centaines de mètre de mon lieu d’arrivée alors que des places réservées aux handicapés sont prévues mais « squattées » par ces imbéciles handicapés du cerveau qui, bien évidemment, n’en ont que pour quelques minutes. Mais si j’arrive durant CES quelques minutes, je fais comment ?
Cela peut être tomber chez moi et mettre de longues minutes à me traîner vers l’endroit le plus proche présentant un point d’appui suffisamment bas pour que je puisse m’y hisser (et qu’il y ait quelqu’un avec moi ou pas n’y change rien parce que je tiens toujours à y arriver seule – orgueil, sans doute -).
Cela peut être me retrouver à un concert (oui, je sais, aller au concert n’est pas vital mais si ça me plait ?) où j’ai une belle place dans les premières rangées mais où, à un moment ou à un autre, les gens du fond viennent devant sans le moins du monde se tracasser de savoir si moi, assise, je vois encore derrière eux, debout.
Cela peut être malencontreusement vouloir aller voir un film dans l’une des rares salles inaccessibles du complexe cinématographique.
Cela peut être ne plus pouvoir mitonner de bons petits plats comme je le voudrais.
Cela peut être ouvrir les vannes en essayant d’attendre d’être seule parce que le trop-plein déborde alors que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase était tellement minuscule…
Cela a été une chute en rue du temps où je « marchotais » encore et ou au moins trois personnes sont passées à côté de moi sans me demander si j’avais besoin d’aide. J’ai finalement réussi à me hisser sur un muret afin de reprendre mon souffle avant de retourner, vaille que vaille, vers ma voiture (quelle idiote aussi avais-je été de vouloir aller manifester mon mécontentement avec les autres enseignants !).
Cela a été cet indélébile : « elle n’a qu’à rester chez elle« , un certain 31 décembre…
Mais…
On ne m’a jamais autant souri et saluée en rue que depuis que je suis en chaise. Peut-être est-ce parfois parce que les gens qui me rencontrent sont quelque peu « déstabilisés » lorsque leur regard glisse vers moi. Peu importe. J’y réponds avec plaisir…
J’aime vraiment bien te lire …… même si le sujet n’est pas « très gai » ! Un ton « bien à toi » que j’apprécie beaucoup …
Comme toi, je ne supporte pas les gens qui se plaignent « sans arrêt » ……. et, d’un certain côté, je les « plains » : peut-être est-ce leur seule façon de se sentir exister, leur seule manière d’attirer l’attention. Ceci dit, ils m’énervent quand même … 🙂
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Merci Jacqueline :-). Bon WE !
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