Présentation. Dans la famille Rokesby, il reste deux fils à marier. D’abord Andrew, qui cache sous ses allures d’impitoyable loup des mers son rôle d’agent secret au service de la Couronne. Puis Nicholas, le cadet, dont la vocation pour la médecine est plus forte que tout. […]

Mon avis. Décidément, que j’aime ces Rokesby à la sauce Bridgerton…
Nous suivons cette fois les (més)aventures de Poppy Bridgerton, cousine de Billie, amenée à rencontrer « incidemment », Andrew, le fils n° 3 des Rokesby, évoqué dans les Chroniques 1 et 2.
Au risque (assumé) de me répéter, je dirai que je me suis à nouveau régalée en découvrant cette fois la confrontation pour le moins mouvementée entre Poppy et Andrew : la jeune femme est littéralement enlevée par deux des marins aux ordres du capitaine Rokesby qui semble tremper dans des affaires « louches ». Ils n’ont eu d’autre choix que d’emmener avec eux Poppy en mer, au grand dam de celle-ci, dont la réputation risque dès lors d’être irrémédiablement compromise.
» -Je suis au regret de vous informer que vous serez notre invitée à bord de l’Infinity durant les deux semaines à venir, autrement dit jusqu’à notre retour.
– Non ! cria Poppy.
Cette protestation horrifiée franchit ses lèvres avant qu’elle ait le temps de plaquer la main sur sa bouche.
– Malheureusement, si. Vous connaissez l’emplacement de notre grotte, je ne peux donc pas vous laisser libre d’aller raconter ce que vous avez vu. Nous la viderons dès notre retour, et nous vous laisserons partir.
– Pourquoi ne pas la vider maintenant ?
– Je ne peux pas, répondit-il simplement.
– Vous voulez dire que vous ne voulez pas.
– Non, je veux dire que je ne peux pas. Et vous commencez à m’agacer.
– Vous ne pouvez pas m’emmener avec vous, protesta Poppy d’une voix chevrotante.
Bonté divine, elle avait envie de pleurer ! Elle avait envie de pleurer comme elle n’avait pas pleuré depuis des années, et si elle ne se reprenait pas, elle allait s’effondrer devant cet homme horrible qui tenait son destin entre ses mains. » [p. 39 – 40]
Le ton est d’emblée donné et il devient vite évident pour le lecteur que ces deux-là sont faits pour s’aimer, une fois les discordances aplanies, ce qui n’est cependant pas une mince affaire : n’oublions pas qu’elle est prisonnière – dans la cabine du capitaine, certes, mais avec l’interdiction formelle d’en sortir, d’autant que tout marin qui se respecte sait qu’une femme sur un bateau porte la poisse – et lui geôlier. Fort bien de leur personne au demeurant, mais quand même...
» – Non, la coupa-t-il, je ne crois pas que les femmes portent malheur, que ce soit sur un bateau ou ailleurs. En revanche mes hommes le croient et je dois en tenir compte. À présent, j’ai du travail. Je serai absent au moins trois heures. Cela devrait vous laisser le temps pour vous préparer pour la nuit. » [p. 75]
L’intelligence, la vivacité d’esprit, le piquant de leurs échanges, ainsi que la curiosité insatiable de l’un et l’autre, feront le reste, à condition qu’ils acceptent de se laisser tenter l’un par l’autre et osent s’avouer l’attirance qui se fait jour. Ce n’est pas gagné...
« Quelque chose de léger, de lumineux, commença à monter en lui. Une onde grisante de désir, mais pas uniquement. Il s’agissait aussi d’attente et d’excitation anticipée.
C’était « l’instant d’avant ». Celui où vous sentez votre cœur battre dans tout votre corps, où chaque respiration paraît descendre jusque dans vos orteils. Celui où rien ne peut se comparer à la courbe parfaite des lèvres d’une femme.
– Si je vous embrassais, vous me laisseriez faire ? murmura-t-il.
Le regard de Poppy s’adoucit et se teinta d’une pointe d’amusement.
D’amusement ?
– Si vous m’embrassiez, répliqua-t-elle, je n’aurais pas l’occasion de vous laisser faire ou pas. Ce serait fait.
On pouvait compter sur Poppy Bridgerton pour couper les cheveux en quatre. Il n’allait toutefois pas lui permettre de s’en tirer à si bon compte.
– Si je m’inclinais ainsi vers vous, dit-il, joignant le geste à la parole. Et si mes yeux s’attardaient sur votre bouche, signe universellement convenu que l’on envisage un baiser, que feriez-vous ?
Elle s’humecta les lèvres. Sans en avoir conscience, devina Andrew.
– Je ne sais pas, chuchota-t-elle.
– Mais c’est en train d’arriver. Je m’incline… Je vous touche la joue…
Elle tourna presque imperceptiblement la tête contre sa main. Andrew eut conscience que sa voix devenait rauque avant même qu’il ne prononce les mots.
– Il ne s’agit plus de ce que vous feriez, mais de ce que vous ferez.
Il rapprocha encore son visage, si près qu’il ne voyait plus celui de Poppy dans son entier, si près qu’il sentait son souffle léger sur ses lèvres.
– Que feriez-vous, Poppy ?
Elle s’inclina alors. Juste un peu, et ce fut suffisant pour que ses lèvres effleurent celles d’Andrew.
Ce fut le plus léger des baisers. Il lui alla droit au cœur. » [p. 199 – 201]
Traduction (anglais USA) : Léonie Speer.
Titre VO (2018) : The other Miss Bridgerton.
Un grand merci aux éditions J’ai Lu pour ce partenariat. À suivre : le tome 4, Tout commença par un esclandre.