Un privé à Babylone, Richard Brautigan

Présentation. Brautigan vient d’écrire un roman policier, si l’on s’en tient à la rumeur. Rien n’est moins sûr cependant. Je pourrais tout autant développer la thèse qu’avec ce livre il nous donne son Histoire du PC américain entre 1938 et 1942, ou son Analyse spectrale de l’influence de la bière, sur les besoins intimes des blondes. Alors qu’en vérité il s’agit une fois de plus d’une plainte. La plainte d’un homme seul (et qui ne l’est pas lorsqu’il écrit ?) qui s’invente, comme son héros, le privé qui rêve à Babylone, une autre vie, où les gestes redeviendraient sensibles. Tout bien pesé, c’est Cocteau qui continue. La jeunesse moderne appréciera, on n’en doute pas.

prive babylone.JPG

Mon avis. Ce livre s’est retrouvé dans ma PAL à cause de/grâce à* Fabrice Colin qui l’avait repris parmi ceux de sa liste proposée dans le cadre de Libraires du mois : http://www.charybde.fr/post/libraires-du-mois-fabrice-colin-juin-2012

Autant l’avouer tout de go : hormis deux noms d’auteur, je ne connaissais strictement rien des livres choisis mais puisqu’il s’agissait de Fabrice Colin… [vous noterez l’art subtil des points de suspension] […]

Je me suis décidée – comme si je manquais d’ouvrages dans ma PAL ! – pour Un privé à Babylone de Richard Brautigan ainsi que Le fonds des forêts de David Mitchell (pas encore lu).

Alors donc, ce livre a l’apparence d’un roman noir, le héros a l’apparence d’un privé qui aurait pu être imaginé par Peter Corris [j’aurais pu évoquer Philip Marlowe ; c’eût été cependant « faire ma maligne » car en réalité, je n’ai jamais lu, jusqu’à présent, « du » Raymond Chandler], le revolver a lui aussi l’apparence d’un revolver… mais l’apparence ne fait pas la personne, ni l’objet d’ailleurs. Finalement, il n’y a que Babylone qui soit effectivement Babylone…

Voici donc un morceau de l’histoire de ce privé, privé de tout pour être précise : fauché comme les blés, dans l’attente d’un rendez-vous, le premier depuis des lustres, pour une « affaire » : l’affaire, son affaire, celle qui va lui permettre d’acheter des balles pour son arme, de remplacer les déchets de son frigo par des choses mangeables, de faire patienter sa logeuse pour (une partie de) son loyer, d’engager une « secrétaire », acheter une (semi) « caisse »…

Encore faut-il que son imagination ne l’emporte pas trop souvent/longtemps à Babylone, là où il incarne tout ce qu’il n’est pas dans sa (triste) réalité…

Vous l’aurez compris, voici un roman noir devenu gris, ou bleu selon les mots. Point de rebondissements en chaîne, point de héros non plus mais quand même quelques cadavres, si.

Et le sourire quasi permanent du lecteur, en l’occurrence la lectrice – moi, pour ceux qui n’auraient pas compris -, une espèce de sourire béat d’un bout à l’autre de cette lecture pas comme les autres. Vraiment pas.

Traduction : Marc Chénetier.

NB : logiquement, si mon enthousiasme pour ce roman a réussi à passer, vous avez dû cocher « grâce à » et non « à cause de ».

 

* Biffer la locution prépositive [si, si, ça s’appelle ainsi] inadéquate.

3 réflexions au sujet de « Un privé à Babylone, Richard Brautigan »

  1. Je choisis « grâce à » ….. Même si le début de ton commentaire ne m’emballait guère, je dois dire que la possibilité de lire un roman avec « un sourire béat » me plaît …. :-)))

    J’aime

Laisser un commentaire