Les anonymes, Roger Jon Ellory

Présentation. Washington. Quatre meurtres aux modes opératoires identiques. La marque d’un serial killer de toute évidence. Une enquête presque classique donc pour l’inspecteur Miller. Jusqu’au moment où il découvre qu’une des victimes vivait sous une fausse identité. Qui était-elle réellement ? Et ce qui semblait être une affaire banale va conduire Miller jusqu’aux secrets les mieux gardés du gouvernement américain…

Une fois encore, R. J. Ellory pousse le thriller dans ses retranchements.

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Mon avis. Mais comment diable ai-je attendu si longtemps avant de me lancer dans la découverte de l’auteur ? Impression que je risque peu d’être déçue avec Ellory…

Après Seul le silence, Les neuf cercles, voici donc Les anonymes, un récit qui s’ouvre sur une scène qui sort des sentiers battus : Catherine Sheridan, une (presque) quinquagénaire, est sur le point de se faire assassiner. Jusque-là, rien « d’original » si je puis dire, mais la particularité de cet homicide tient dans le fait qu’elle sait pertinemment que son meurtrier est dans sa maison, qu’elle va « y passer » et semble pourtant attendre, fataliste, que se produise l’inéluctable.

  « Ça y est, se dit-elle.

Je m’appelle Catherine. J’ai 49 ans, et ça y est.

   Merde.

   Elle bouge vers la droite, tend la main et touche la surface froide de l’évier. Elle s’agrippe au rebord et, en usant comme d’un levier, se retourne lentement vers la porte.

   Elle se demande s’il est déjà dans la maison.

   Elle se demande si elle ferait mieux de rester immobile et d’attendre, ou au contraire de bouger.

   Elle se demande ce qu’il veut d’elle.

   Elle met du temps à prendre une décision, mais, une fois qu’elle l’a prise, elle s’y tient.

   Elle traverse la cuisine jusqu’au salon – déterminée, concentrée. Elle sort un DVD de l’étagère contre le mur et, avec la télécommande, ouvre le lecteur, pose le disque, referme le lecteur, appuie sur des boutons et attend que le son arrive… Puis l’image apparaît. Elle hésite.

   Une musique.

   Elle monte le volume.

   Musique composée par Dimitri Tiomkin.

   La vie est belle. » [p. 11 – 12]

  

L’inspecteur Miller, qui vient tout juste de réintégrer ses fonctions, est chargé de l’enquête et il a conscience qu’il n’a pas le droit à l’erreur. « On » l’attend au tournant depuis que les médias l’ont jeté en pâture au public… Or Catherine Sheridan est la quatrième victime d’un serial killer qui semble prendre un malin plaisir à mettre en scène des meurtres commis de manière particulièrement horrible.

À côté du mode opératoire sanguinolent, les indices sont peu nombreux : un ruban coloré « artistiquement » laissé sur les lieux, ainsi qu’une odeur écœurante de lavande. La Police du 2e district patauge, au sens propre comme au figuré.

Pas (infime) à pas (infime), l’équipe de Miller et Roth, son coéquipier, épluche toutes les pistes possibles et (in)imaginables : il est indispensable de coffrer celui qui se cache derrière tout cela.

Ce récit principal est entrecoupé de pages en italiques, rédigées par John Robey, un homme désireux de « dévoiler les ombres » et « montrer au monde ce qui s’y cache« . [p. 62] Petit à petit, ce personnage se livre :

  « Je sais l’amour et le dépit, les cœurs brisés et les désillusions. J’ai compris que le temps sert à émousser cette lame de rasoir qu’est le deuil, jusqu’à ce que la plaie des souvenirs soit moins profonde et que ne subsiste plus que la douleur de l’oubli forcé.

   Je sais tout des promesses tenues comme des promesses trahies. » [p. 60]

  « […] j’attends – (in)visiblement – que la police frappe à ma porte et me dise ce que j’ai prévu d’entendre.

   Parfois je me surprends à retenir mon souffle en attendant cet instant-là. » [p. 143]

 

Indépendamment de l’intrigue extrêmement fouillée, relative au Complot, teintée d’habile manipulation et de culpabilité, j’ai beaucoup apprécié les personnages principaux : Miller et ses (profondes) fêlures ;  Roth, soutien conventionnel de Miller ; le vieux couple Shamir qui tente de veiller « de loin » sur Miller, lui rappelant qu’il est bon de se nourrir de temps à autre ; John Robey lui-même, homme de l’ombre bien décidé à mettre en lumière ce qui n’était pas censé l’être. En outre, la relation qui se noue entre Miller et Robey est unique…

Traduction : Clément Baude.

 

Ce livre entre dans le challenge « Phileas Fogg » (auteur anglais).

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