Le parrain et le rabbin, Sam Bernett

Présentation. Novembre 1943, Milan.  Les Allemands s’apprêtent à donner l’assaut dans une école juive qui accueille clandestinement une quinzaine de jeunes garçons et un rabbin. Par chance, un des élèves a pu donner l’alerte. Fuir, donc. Mais pour aller où ?

Pendant plusieurs nuits, ayant à peine de quoi survivre, le petit groupe va se retrouver en haute montagne avec pour ultime espoir de rejoindre la Suisse en passant la frontière à pied, et pour seuls compagnons le froid, la faim, le découragement et la sensation de la mort qui vient.

À New York, des membres du Rescue Committee travaillent nuit et jour pour sauver les Juifs d’Europe. Tandis qu’à Milan les choses se précipitent, une idée folle surgit : « Pourquoi ne pas faire appel à la Mafia ? » […]

Voici le récit authentique de cette chasse à l’homme que nous rapporte Sam Bernett de son écriture à la fois trépidante et sensible.

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Mon avis. Un récit qui se lit d’une traite…

Le livre commence à Milan, en 1943 ; la Gestapo se prépare à investir une école où sont réfugiés des enfants juifs, sous la houlette d’un rabbin. Coïncidence : Carlo s’est levé pour satisfaire un besoin naturel et donne aussitôt l’alerte. Enfants et adultes réussissent à se sauver par la porte de derrière. Les fugitifs ont à peine eu le temps d’enfiler l’un ou l’autre vêtement (pas très) chaud qu’ils se retrouvent bien vite la proie du froid et de la faim tandis qu’ils tentent de rejoindre la Suisse par la haute montagne…

De l’autre côté de l’Atlantique, le Rescue Committee tente de venir en aide aux Juifs européens et cherche une solution afin d’évacuer le petit groupe voué à une mort certaine. C’est alors qu’un des membres du groupe ose émettre une idée à mille lieues de leurs principes : faire appel à Joseph Bonanno, alias Joe Bananas, un des parrains de la mafia, celui qui deviendra des années plus tard capo di tutti capi, chef de tous les chefs mafieux.

Nous découvrons la manière (oh combien maladroite) dont quelques membres (heureusement inconscients) du comité essaient d’entrer en contact avec les hommes du parrain et les délicates tractations qui s’en suivront : Joe Bonanno est une personnalité à qui il vaut mieux éviter de se frotter et le grand rabbin Chaskel Werzburger a lui aussi un caractère bien trempé.

Je n’ai pu m’empêcher d’imaginer une adaptation cinématographique de ce texte, avec une véritable scène d’anthologie : la rencontre entre les deux hommes, choc entre l’eau et le feu, entre le bien et le mal. Un échange au cours duquel le lecteur retient son souffle, tant l’infime légèreté d’une plume risquerait de faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre, avec des conséquences (in)imaginables…

  « Quand mes gars, ils m’ont dit qu’un rabbin de Brooklyn voulait m’entreprendre, j’ai cru à une joke… Ça m’a fait marrer, moi, je suis comme ça, voyez, j’aime ça, me marrer ! Pas vous, vous aimez pas vous marrer ? » [p.  75]

  « Le rabbin ne supporte plus d’être là, ne supporte plus ce plouc, ce péquenot, ce parvenu. En quelques mots très brefs, il dit ce qui les a conduits ici, chez lui.

   Bonanno rouvre les yeux et l’arrête d’un geste de la main.

  « Pardon, rabbin », fait-il d’une voix presque aussi onctueuse que son geste.

   Puis, péremptoire, s’adressant aux autres :

  « OK, ce gars-là a un problème ou je ne m’y connais pas. Des yeux comme ça, ça ne s’invente pas. Laissez-moi avec lui. Allez, allez, basta, vaffanculo ! » [p. 79]

Éditions Le cherche midi, 2017.

 

Un grand merci à Gilles Paris et aux éditions Le cherche midi pour ce partenariat.

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