Il est juste que les forts soient frappés, Thibault Bérard

Présentation. Lorsque Sarah rencontre Théo, l’amour les court-circuite. Elle, l’écorchée vive, la punkette, se laisse convertir au bonheur par ce garçon aux airs de lutin, fou de Capra et de Fellini. Dans le tourbillon joyeux de leur jeunesse, de leurs amis et de leurs passions, naît Simon, puis Camille. Mais très vite, comme si leur allégresse avait provoqué la colère de l’univers, les médecins détectent à Sarah un cancer qui progresse à une vitesse alarmante. On leur annonce un combat sans trêve. Refusant de céder au désespoir, le couple choisit de s’y lancer à corps perdu, comme dans une extraordinaire croisade dont leur courage et leur amour seraient les complices.

Couverture Il est juste que les forts soient frappés

Mon avis. Il est très rare que je parle de « coup de cœur » à propos d’un livre (le deuxième seulement cette année). C’est pourtant bien le cas ici : coup de cœur, coup au cœur…

Le récit est pris en charge par Sarah qui, on l’apprend d’emblée, est décédée. Elle ne peut rien révéler de la mort (« C’est simplement impossible, il y a comme un écran blanc entre les mots et moi qui se dresse à l’instant même où j’exprime le plus petit début d’intention de vous raconter. » – p. 14), mais elle sait désormais « que le but ultime de tout le monde, dans la mort, c’est […] se faire oublier des vivants. » [p. 13], en l’occurrence Théo, son compagnon, ainsi que Simon et Camille, leurs enfants.

Sarah replonge dans son passé : évocation d’une (percutante) rencontre salvatrice, alors que la jeune femme torturée a vingt ans.

« Alors je ferme les yeux. D’un bloc, ma tête se remplit de tout ce qui m’écrase, m’étouffe et m’interdit d’être une jeune fille gaie de 20 ans comme tant d’autres. » [p. 24]

Et puis surgit Théo, au « grand corps de gamin – j’aime bien le taquiner avec ça, il a six ans de moins que moi, 24 ans, c’est un minot ! » [p. 31]. Délicieusement agaçant, Théo. Une énergie débordante, Théo. Tellement débordante qu’elle éclabousse Sarah, étonnée de « tomber » amoureuse. Moineau et Lutin se sont trouvés.

Si « Théo a un don pour l’insouciance et la légèreté », il se sent aussi « comme guetté par un drame immense, sorte d’oiseau noir qui n’attendrait qu’une seconde d’inattention pour fondre sur lui. » [p. 39 – 40]. Cet oiseau noir prendra la forme d’un/du crabe alors que Simon et ses parents attendent l’arrivée prochaine de Camille.

S’engage une course contre la montre parce que la maladie a décidé de se presser : le combat commence. Ardu. Ils sont soutenus par la famille, les amis, le corps médical en général et « Dr House » en particulier, dans cette « course à la vie ». Course au sens propre aussi pour Théo, « contraint de grandir », et qui doit jongler entre travail, hôpital, école, crèche et repos relatif.

« Mais parce que votre rôle à vous, monsieur Dorneval, c’est de me dire que j’ai tort. Qu’il va y avoir des rémissions, que son état va s’améliorer. Nous allons entamer un traitement, une chimiothérapie très lourde, et le but sera bien d’obtenir une première rémission.

Théo chancelle, refusant de céder au soupçon d’espoir qui vient se frotter à son cou comme un animal perfide. D’ailleurs, le docteur n’a pas prononcé le mot « espoir », ni celui de « guérison » ; il s’en est bien gardé. Il lui a tout de même offert « rémission » qui faisait partie de la liste initiale. […]

Ça lui va. Il ne demande rien de plus. La force qui l’anime est désespérée, c’est une « force noire », comme il la baptisera, une force qui interdit de rêver que le cauchemar ait pu ne jamais avoir lieu ou même qu’il cessera un jour.

Mais c’est aussi une incroyable puissance qui le rend capable, oui, de soulever des montagnes. » [p. 131 – 132]

« Roman » sublime. Intimement bouleversant. Profondément lumineux. Servi par une superbe plume, qui peint avec humour les petits bonheurs de la vie, précieux, savoureux. Oh, bien sûr, les larmes ont coulé à la fin, abondantes. Émotion liée à la mort. À la vie. Aussi.

Un tout grand merci aux éditions J’ai lu pour cette magnifique découverte.

4 réflexions au sujet de « Il est juste que les forts soient frappés, Thibault Bérard »

  1. Oh là là….je note car coup de coeur ….mais cesera pour plus tard car j’ai envie de légèreté ou juste d’un petit thriller pour le moment ….

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