Comment j’ai arrêté de CONsommer, Frédéric Mars

Présentation. « On est foutus, on mange trop. » Vous vous souvenez de cette chanson d’Alain Souchon ? Aujourd’hui, il faudrait en actualiser les paroles : on est foutus, on consomme trop. On achète de tout, tout le temps, et n’importe comment. On CONsomme, on dépense, on accumule, sans jamais se demander ce que ces objets supplémentaires nous apportent réellement. Pendant une année, l’auteur a tenu un pari avec sa famille : deux adultes et un enfant qui ont tenté de déconsommer.

De ne plus se gaver en pilote automatique, de reprendre en fait le contrôle de leur vie. Pour répondre (enfin) à cette vraie question : « Parmi tous les instants de mon bonheur, lesquels dois-je à ces choses que j’achète à longueur de temps ? » Sans soldes. Sans hypermarchés. Sans abonnements. Sans carte bleue. Sans crédit ni découvert. Sans publicité. Sans marques. On imagine les difficultés, notamment à Noël, lors de la fête des Mères, pour le choix des vacances, à la rentrée des classes ! Comment s’en sortir ? Très drôle et pragmatique, Comment j’ai arrêté de CONsommer est le journal de bord d’un résistant à la fièvre acheteuse, sans idéologie ni moralisme.

CONsommer.jpg

Mon avis. Je me suis proposée pour la lecture de cet essai de Frédéric Mars (grand merci à l’auteur) après avoir lu çà et là sur le Net que la question de la CONsommation y est traitée avec humour. Et effectivement, j’ai réellement passé un excellent moment alors qu’a priori, le sujet ne prête nullement à (sou)rire. Et pourtant…

Beaucoup de réflexions ont surgi au fil de ma lecture, entre autres celle qu’il me semble que je suis moins « intoxiquée » à la base que paraissait l’être l’auteur avant son expérience ; que certaines « propositions » sont déjà (presque) d’application à la maison ; que je serais pourtant tout à fait incapable – le voudrais-je ? – d’aller si loin dans le processus de « déconsommation ». Alors donc, si tout a été mis en œuvre de cette manière au sein de la famille de Frédéric Mars, chapeau bas.

Le livre se présente comme un journal, rédigé mensuellement : une année « (dé)consommante » qui s’avérera pour le moins aux antipodes des précédentes et par là même, riche en constats relatifs aux habitudes d’achats formatés. Programmés en quelque sorte, tant par la société que par soi-même. À son corps défendant. Ou presque.

Passée la difficulté de (tenter de) convaincre sa moitié et de tenir bon face à son petit bonhomme avide de Ketchup, l’enfer devient très vite les autres, les/certains amis qui, dans un premier temps, trouvent l’idée de « consommer autrement » originale (pourquoi pas ?) avant de s’en lasser quand elle perturbe (trop) leurs propres habitudes.

À côté de cela, surgissent des situations douces amères ou franchement cocasses :

    » Mon poussin, tu peux m’apporter des notes repositionnables et du ruban adhésif transparent, s’il te plaît ? « 

   Tête effarée de mon petit rouquin.

    » Quoi ?

   – J’ai besoin de notes repositionnables et de ruban adhésif transparent pour établir le plan de mon prochain livre.

   – Je comprends rien à ce que tu m’as demandé.

   – Ben, c’est simple à comprendre pourtant : je vais coller les notes repositionnables sur mon tableau blanc effaçable pour pouvoir composer la structure de mon livre.

   – Tu veux dire… sur ton Veleda ?

   – Oui, le tableau blanc effaçable de mon bureau. »

   Après un silence.

    » Papa ?

   – Oui mon chéri.

   – Pourquoi tu parles bizarrement, aujourd’hui ? « 

   O.K., je l’admets. Après ce petit dialogue infructueux et gênant avec mon fils âgé de sept ans, il est évident que ma tentative de substituer des périphrases aussi interminables qu’inintelligibles aux marques est un échec. En d’autres mots : ça me fait passer pour un abruti aux yeux de ma progéniture, ce qui n’est pas vraiment l’objectif.

   Pour en être bien certain, et avant de lâcher l’affaire, je réédite l’expérience dans un fast-food bien connu. […]

    » Bonjour Monsieur, je vous écoute…

   – Eh bien… je vais prendre un sandwich à base de bœuf grillé, de sauce à la tomate et de cornichons.

   – Pardon ? « 

   –  Son sourire est déjà moins radieux qu’il y a dix secondes.

    » Euh… ce que je viens de vous dire, en fait : un sandwich à base de bœuf grillé, de sauce à la tomate et de cornichons.

   – Vous voulez dire un hamburger ?

   – Voilà. « 

   Elle s’exécute avec un drôle de rictus. Des cinglés, elle doit en voir à longueur de journée, mais apparemment, je fais partie de son Top 5 du mois. […]

    » Ketchup, mayonnaise ?

   – Pas de mayonnaise, mais une sauce sucrée à la tomate, ça m’ira très bien.

   – Donc Ketchup, hein, c’est bien ça ? « 

   Elle a jeté trois sachets blanc et rouge sur le plateau sans attendre ma réponse.

    » Vous voulez une boisson avec ça ? Coca ?

     – Un soda goût caramel allégé, s’il vous plaît.

    –  Quoi ?  »  [p. 178-180]

[Pour l’anecdote, j’avais emporté le livre dans la salle d’attente lors d’un rendez-vous médical ; j’ai précisé alors au médecin lorsque je suis entrée que les larmes étaient de rire… ; je venais de lire ce passage où l’auteur a décidé « d’extirper le poison des marques » de son vocabulaire].

On se sent aussi interpellé par la remarque relative à la pollution publicitaire sonore dont nous sommes abondamment gratifiés ou encore par la notion de Bonheur national brut préconisée par le Bhoutan en lieu et place du PNB.

Quelques détails « excédentaires » (histoire de demeurer dans le propos) pour terminer : dans mon village, l’autocollant « Pas de publicité SVP » apposé sur ma Boîte aux lettres est tout à fait respecté, à tel point d’ailleurs que je n’ai plus connaissance d’informations parfois importantes relatives à la vie de mon patelin ; pas de Scotch chez nous, mais bien du papier collant ; je n’avais jamais entendu parler du Critérium en dehors du cyclisme ; le Frisco existe mais pas l’Esquimau ; le choco aussi en lieu et place du Nutella ; nous envoyons bon nombre de SMS mais jamais de Texto(s) ; je n’envisage pas de me passer de Bic, Post-it ou Tippex…

Quant aux vacances, je pratique depuis un moment déjà, par la force des choses sans doute, le summum de la « déconsommation » : je reste à la maison Clin d'œil.

7 réflexions au sujet de « Comment j’ai arrêté de CONsommer, Frédéric Mars »

  1. Eh ben il va direct dans ma wish-list même si je crois qu’il oublie un de nos consommables (même plusieurs pour moi) … le livre 😀
    Très bel avis 😉

    J’aime

  2. Un livre qui devrait me faire sourire à de nombreuses reprises …. même si j’imagine que l’auteur va « un peu loin » dans la « dé-consommation »….
    Comme toi, je dis « papier collant », .et certainement d’autres « expressions »…
    Je dis « Nutella » ….car comme « choco », je n’achète que cette marque …Et que « choco », chez moi, = Frisco ou Esquimau…
    Je dis « tableau blanc effaçable »….mais je dis Tippex …
    Livre à lire …..pour découvrir mon degré de « consommatrice pervertie » ….

    J’aime

Laisser un commentaire