Entre deux mondes, Olivier Norek

Présentation.

ADAM A DÉCOUVERT

EN FRANCE UN ENDROIT

OÙ L’ON PEUT TUER

SANS CONSÉQUENCES.

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Mon avis. Un roman (?) indispensable…

Le récit s’ouvre sur deux scènes qui prendront leur sens par la suite. L’une, intitulée L’enfant, se déroule « quelque part en Méditerranée » : dans l’embarcation qui transporte 273 migrants, une petite fille tousse de manière récurrente, si bien qu’elle risque de les faire repérer lorsqu’ils auront embarqué dans des camions. Il est alors demandé à la maman de jeter son enfant par dessus bord…

L’autre, Le fou, transporte le lecteur à Calais, en octobre 2016, au dernier jour du démantèlement de la « Jungle »(1) : alors que les pelleteuses viennent de déterrer des bouts de corps à la périphérie du camp, une silhouette sale, dépenaillée, surgit de la forêt, s’agenouille face au trou et se met à creuser la terre de manière frénétique, avant de repartir vers les bois.

Le récit se centre ensuite sur la Syrie, plus particulièrement la « salle d’interrogatoire » du centre de détention du service de renseignement militaire auquel appartient Adam, officiellement « agent dévoué de la police militaire du régime de Bachar el-Assad ». Officieusement, Adam fait désormais partie de l’ASL, l’armée syrienne libre. Et le prisonnier « interrogé » – autrement dit torturé – fait aussi partie de l’ASL ; il a jusqu’à présent résisté mais Adam sait que c’est une question d’heures avant qu’il parle. Il doit donc organiser dans l’urgence la fuite de sa femme et sa fille avant de prendre lui-même le large.

Focus ensuite sur Calais, en juillet 2016, où vient d’être muté le lieutenant Bastien Miller. Il est loin de se douter qu’il va (tenter d’) ouvrir les yeux sur un univers insoupçonné et insoupçonnable, alors qu’il n’a lui-même pas une vie de famille harmonieuse…

 « – J’ai l’impression que le camp de réfugiés est au centre de beaucoup de tensions. Cette Jungle, vous y allez souvent ?

   – Aux abords, tous les jours. À l’entrée, quand il le faut. Mais dedans, rarement. C’est à la fois une zone de non-droit et un bidonville.

  – Et votre job consiste en quoi ?

   Passaro perdit un instant sa bonhomie. Cortex et Sprinter se gardèrent de répondre ou de blaguer.

  – J’aurais presque honte de le décrire. Faut le vivre. Mais personne ne veut le vivre. Nous, on y arrive à peine. » [p. 105]

« Ce job, il se fait en apnée », avait dit Passaro. [p. 132]

Le lien entre Bastien et Adam, ce sont leurs « réflexes de flic » ; c’est cette jungle avec ses (non-)droits, ses exigences, ses atrocités. Et ses marques d’humanité. Parfois. C’est aussi le petit Kilani dont le destin embue le regard.

La souffrance sourd des pages relatives aux migrants qui tentent « simplement » de survivre ; elle surgit également aux côtés des policiers qui ont la lourde tâche (d’essayer) de faire leur métier tout en conservant leur humanité.

Il est des livres dont on aimerait qu’ils ne soient que de la fiction. Entre deux mondes est de ceux-là.

Un grand merci aux éditions Michel Lafon pour ce partenariat.

(1) « – C’est légèrement inapproprié. Qui a trouvé le nom ?

   – N’y voyez pas de racisme, ce sont les migrants iraniens eux-mêmes. Quand ils sont arrivés sur place, ils ont vu un morceau de forêt, alors ils ont appelé l’endroit « la Forêt ». En langue perse, jangal. Ici, on a entendu « jungle », prononcé à l’anglaise. Un simple quiproquo. » [p. 100]

Ce titre entre dans le challenge de la Licorne, 4.

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